Réparer le pipeline qui fuit : des membres de la communauté de recherche se réunissent à Addis‑Abeba pour faire progresser l’égalité des genres dans les STIM
Des dizaines de chercheuses et chercheurs financés par le CRDI s’attaquent à ce que l’on appelle le « pipeline qui fuit des STIM », une forme persistante d’inégalité entre les genres qui a de graves répercussions sur le progrès de l’humanité.
Faisant référence à la faible rétention des femmes dans les domaines des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques (STIM), le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a déclaré : « Les femmes et les filles ont leur place dans les sciences. Il est temps de reconnaître que l’inclusion favorise l’innovation et de laisser chaque femme et chaque fille réaliser son véritable potentiel. »
La représentation des femmes dans l’enseignement des STIM diminue à mesure qu’elles évoluent du niveau primaire au niveau supérieur. Dans la population active, les femmes ne constituent que le tiers de celles et ceux qui exercent des professions dans les STIM. Les raisons à la base de ce problème – les préjugés sexistes et les obstacles systémiques interconnectés – sont principalement discutées dans les contextes de l’Ouest et du Nord; c’est pourquoi le CRDI a investi dans un groupe de 16 projets de recherche afin de comprendre les obstacles précis qui font entrave à l’égalité des genres dans les STIM dans certains pays en Afrique et en Amérique latine.
Qu’il s’agisse d’une vérification dans une perspective d’égalité des sexes réalisée dans une grande université du Zimbabwe ou d’un programme novateur de bourses d’études à l’appui de femmes scientifiques autochtones au Mexique, 19 équipes de recherche du CRDI adoptent différentes approches pour combler les lacunes dans les connaissances.
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Travailler ensemble pour trouver des solutions inclusives
Chacun des projets est prometteur en soi, mais en tant que cohorte de recherche, leurs intersections ont leurs propres leçons à mettre en commun. C’est pourquoi le CRDI a organisé un atelier à Addis-Abeba, en Éthiopie, en 2024, ayant réuni près de 30 représentantes et représentants des équipes de recherche en vue d’élaborer un programme de recherche, de déterminer les prochaines étapes à suivre pour surmonter les défis cernés et trouver des stratégies communes et des possibilités de collaboration en Amérique latine et en Afrique.
Pendant trois jours, le groupe a fait le point sur l’expérience de chaque équipe de recherche dans son pays, sa région ou son domaine d’intérêt en STIM.
Certaines personnes ont rapporté comment leur équipe a contribué à accroître la sensibilisation à la nécessité d’avoir des politiques en matière de genre dans les établissements de STIM et à soutenir l’élaboration de lignes directrices et de stratégies en matière de genre. D’autres équipes ont expliqué comment elles ont numérisé et diffusé des données importantes provenant d’archives physiques d’institutions individuelles, tandis que d’autres se sont concentrées sur leurs expériences quant au renforcement de la confiance des jeunes femmes dans des domaines dominés par les hommes tels que la formation et la recherche agricoles.
Les différentes équipes ont observé des intersections notables dans leur travail. Elles ont souligné les préjugés sexistes omniprésents qui rendent difficile l’accès aux programmes en STIM, le manque de possibilités d’éducation offertes aux femmes pour qu’elles puissent passer des programmes en STIM à des carrières en STIM, ainsi que les environnements de travail exclusifs et les politiques qui empêchent les femmes exerçant une profession dans les STIM de réaliser leur plein potentiel.
Les chercheuses et chercheurs ont pu cerner des intérêts et des résultats de recherche communs, ce qui a ouvert des possibilités de collaboration interrégionale future et des plans pour plaider en faveur du changement d’un front uni. Les équipes d’Afrique de l’Est se sont particulièrement intéressées à la façon dont l’équipe de la Colombie est parvenue à mettre à l’échelle ses stratégies en matière de genre, d’égalité et d’inclusion dans différents établissements d’enseignement en collaborant et en co-créant sur une base continue avec les parties prenantes locales. Les occasions de discuter de la façon dont cette approche peut être reproduite ou mise à profit ont été un moteur important de l’activité.
Faits saillants
- La représentation des femmes dans les domaines des STIM diminue considérablement entre l’enseignement primaire et le marché du travail, un tiers seulement des personnes exerçant une profession dans le domaine des STIM étant des femmes.
- Les recherches financées par le CRDI ont accru la sensibilisation à la nécessité d’élaborer des politiques en matière de genre dans les établissements de STIM et amélioré le soutien institutionnel en ce qui concerne les lignes directrices et les stratégies en matière de genre.
- Des équipes appuyées par le CRDI ont numérisé et diffusé des données importantes provenant d’archives physiques d’institutions individuelles, tandis que d’autres ont déclaré avoir renforcé la confiance des jeunes femmes pour qu’elles s’engagent dans des domaines dominés par les hommes tels que la formation et la recherche agricoles.
- Des membres de la communauté de recherche de diverses régions se sont réunis à Addis‑Abeba pour faire connaître ces résultats et ces stratégies auprès des parties prenantes dans le domaine politique et d’autres chercheuses et chercheurs, favorisant ainsi la collaboration interrégionale afin de lutter contre les préjugés sexistes et les obstacles systémiques dans le domaine des STIM.
Sensibiliser les responsables de la prise de décisions politiques
Après l’atelier, les chercheuses et chercheurs ont assisté au 2e Dialogue interrégional sur l’éducation et le développement en Amérique latine, dans les Caraïbes et en Afrique organisé par Obreal, la Commission de l’Union africaine et le ministère de l’Éducation du Brésil. Les décideuses et décideurs politiques présents à l’événement ont apprécié l’interaction avec les membres de la communauté de recherche – ce qui est plutôt rare dans de tels forums – leur demandant leur avis et discutant des nuances de leur pays ou du contexte institutionnel. Par exemple, une équipe de Bolivie et du Brésil a parlé des lacunes qu’elle a cernées au chapitre de la collecte de données ventilées par sexe avec les ministres, les associations et les organisations universitaires ainsi que les chancelières et chanceliers d’université et d’autres parties prenantes lors du forum politique qui a eu lieu au siège de l’Union africaine à Addis‑Abeba.
Comme l’a expliqué l’une des partenaires de recherche du CRDI, Esther Matemba : « L’enjeu plus important du manque de données sur l’enseignement supérieur en Afrique et sur la région du Sud en général était prédominant dans les discussions. Cela confirme la nécessité d’accroître la recherche en éducation et le rôle essentiel que jouent les chercheuses et chercheurs en éducation en Afrique. Toute l’expérience a été révélatrice, motivante et inspirante pour moi en tant que chercheuse en éducation africaine et dans mon travail de promotion de la recherche en éducation à l’ingénierie en Afrique. »
Tirer parti de l’élan
Les responsables de la prise de décisions politiques ont quitté l’événement avec une nouvelle prise de conscience du manque de données sur le genre, l’équité et l’inclusion dans les systèmes d’enseignement supérieur et de recherche et certaines des mesures innovantes prises pour combler cette lacune. Ces occasions d’échange entre la communauté de recherche et les responsables de la prise de décisions politiques sont cruciales pour souligner le rôle des données probantes dans le processus décisionnel, en particulier lorsqu’il existe un intérêt pour la collaboration transnationale et interrégionale.
Les six jours consacrés à la promotion de l’égalité des genres dans les domaines des STIM dans les pays du Sud ont renforcé l’élan au CRDI et auprès de la communauté de recherche et des parties prenantes pour aller de l’avant sur le plan de l’inclusion des genres. Les partenaires de recherche du CRDI dans les initiatives Faire tomber les barrières et Genre dans les STIM prévoient terminer leurs recherches et faire part de leurs conclusions en 2025.