Renforcement des communautés, des données et des systèmes de santé en Jordanie

À l’échelle mondiale, la réalisation des objectifs de développement durable des Nations Unies est remise en question par de nombreux événements, notamment la pandémie de COVID-19, les conflits en cours et l’aggravation de la situation climatique.
La région du Moyen-Orient ne fait pas exception et est, en fait, à l’avant-garde de ces défis de développement. La Jordanie, par exemple, a connu des vagues de personnes réfugiées et migrantes déplacées de la région au cours des dernières décennies. Les systèmes de santé du monde entier, y compris en Jordanie, sont débordés et ont du mal à fournir des services universels de qualité face aux conflits, aux chocs climatiques ou aux épidémies et aux pandémies. Dans ce contexte, les systèmes d’information sur la santé (SIS) sont essentiels pour fournir des renseignements fiables et permanents sur les services de santé afin de garantir la réactivité aux besoins de santé et l’utilisation prudente des ressources rares.
Faits saillants
- Les systèmes de santé du monde entier sont mis à l’épreuve par les ramifications de la pandémie de COVID-19, les conflits en cours et la crise des changements climatiques.
- L’accès universel aux soins de santé, un objectif de longue date de l’Organisation mondiale de la santé, est de plus en plus difficile à atteindre.
- Les systèmes d’information sur la santé (SIS) peuvent être essentiels au renforcement des systèmes de santé et de leurs objectifs généraux d’universalité et d’équité.
- Un SIS robuste peut fournir des données probantes qui peuvent faciliter la réponse des décisionnaires aux besoins de santé de la population, y compris ceux des groupes vulnérables.
Le gouvernement jordanien s’est engagé à atteindre la couverture sanitaire universelle d’ici 2030 dans le cadre de la Stratégie 2023-2025 du ministère de la Santé et de la Stratégie de coopération avec les pays 2021-2025 pour l’Organisation mondiale de la santé et la Jordanie. Cependant, l’accès aux soins de santé reste fragmenté et centré sur l’hôpital, et seuls 70 % des Jordaniens sont assurés. Bien que la Jordanie ait inclus les personnes réfugiées dans tous les aspects de la réponse de santé publique à la pandémie de COVID-19, saluée comme exemplaire, le système de santé reste mis à rude épreuve en raison des ramifications de la pandémie et d’une réduction du financement humanitaire pour la réponse à la crise en Syrie.
Bien que ces défis subsistent, il est nécessaire de renforcer les systèmes de santé afin qu’ils soient réactifs, équitables et résilients. Pour atteindre cet objectif, il est important de porter une attention soutenue à des données fiables et à des solutions localisées à la lumière des données probantes générées afin de corriger les inégalités en matière de santé et de promouvoir une meilleure santé et un meilleur bien-être.
Afin d’améliorer l’efficacité du système de santé, le gouvernement jordanien a mis à l’essai un système d'initiatives de cybersanté dans les hôpitaux publics en 2011 pour stocker, récupérer et mettre à jour les dossiers électroniques des patientes et des patients gérés par les établissements de santé. Cependant, les systèmes d’information sur la santé du pays sont confrontés à des défis inhérents, notamment une mauvaise gouvernance et une mauvaise gestion, un manque de coordination entre les nombreuses entités gouvernementales qui gèrent les services de santé et une faible surveillance du secteur privé de la santé.
Les autres défis signalés comprennent le manque de réglementations et de politiques pour soutenir le SIS, une pénurie de ressources financières, une pénurie de personnel qualifié et un manque de formulaires standard pour le traitement des données des patientes et des patients, ce qui entraîne un système de dossiers de santé inadéquat. En fait, la confidentialité des renseignements, le consentement éclairé et la protection de la vie privée sont également de sérieux obstacles à la pleine utilisation des systèmes de cybersanté en Jordanie, et le plan stratégique du gouvernement jordanien pour les systèmes d’information sur la santé (2019-2023) n’a pas encore été mis à jour pour relever ces défis.
Les équipes de recherche financées par le CRDI s’efforcent de combler cette lacune en renforçant le SIS et les plateformes numériques, en générant des données probantes pour améliorer la prise de décisions en plus de l’accès des patientes et des patients aux soins et de leur expérience.
Faits saillants
- Au cours des dernières années, le CRDI a soutenu des projets de recherche qui répondent aux défis du SIS en Jordanie et aux initiatives stratégiques du gouvernement jordanien visant à renforcer son SIS.
- Des équipes de recherche en Jordanie, avec le soutien de leurs homologues libanais, ont effectué la première évaluation complète du SIS, plus particulièrement en capturant les besoins des groupes de populations vulnérables.
- Des équipes de recherche de la Jordan University of Science and Technology ont élaboré et mis en œuvre le premier système électronique normalisé de surveillance et de déclaration pour appuyer les décisions en matière de soins de santé pendant la grossesse.
- Des équipes de recherche d’EMPHNET, le Réseau de santé publique de la Méditerranée orientale à Amman, ont élaboré et mis en œuvre un registre de santé reproductive afin de se concentrer sur le renforcement de la représentation des groupes de populations mal desservis.
De solides systèmes de données sur la santé signifient de meilleurs soins et une meilleure prise de décisions
Grâce à des subventions du CRDI, des équipes de recherches ont mené la première évaluation exhaustive du SIS en Jordanie, renforçant ainsi la collecte, l’analyse et l’utilisation des données pour éclairer les politiques et les pratiques en matière de santé. En particulier, l’étude a évalué dans quelle mesure les systèmes existants de la Jordanie et leurs indicateurs intégrés captent les expériences et les besoins prioritaires des groupes vulnérables, y compris les mesures de la santé des mères, des adolescentes et des adolescents, des enfants et des personnes réfugiées. Le ministère jordanien de la Santé a déjà commencé à réviser ses systèmes existants en utilisant les résultats de l’évaluation.
Parallèlement, le CRDI a financé un projet visant à élaborer et à mettre en œuvre le premier système électronique normalisé de surveillance et de déclaration des données sur la mortalité périnatale et néonatale en Jordanie. Le Système jordanien de surveillance de la mortalité périnatale et néonatale (JSANDS) qui en a résulté recueille, organise, analyse et diffuse des données connexes, ainsi que sur leurs causes.
Les infirmières jordaniennes signalent que le système les a responsabilisées au sein des équipes de soins de santé en leur donnant l’information nécessaire pour soutenir des soins éclairés aux patientes et aux patients. Rudaina Shdefat, infirmière gestionnaire d’unité travaillant dans l’un des cinq hôpitaux desservant les populations défavorisées, était très satisfaite des interventions qui ont eu lieu pour améliorer le taux de survie des nouveau-nés et suivre les mortinaissances, y compris la formation d’un comité chargé d’examiner les causes contribuer aux mortinaissances et aux décès néonatals et cerner les mesures qui pourraient réduire le nombre de décès évitables similaires. Elle a déclaré à l’un des membres de l’équipe JSANDS : « Je ne peux pas vous dire à quel point je suis satisfaite de ce que les membres du Comité d’examen des décès proposent après chaque réunion afin d’éviter des décès similaires. »

Faciliter l’accès aux soins à l’aide des plateformes numériques
D’autres projets de recherche financés par le CRDI ont mis l’accent sur le renforcement des soins directs et de l’accès aux patientes et aux patients au moyen de plateformes et de systèmes numériques.
Le gouvernorat jordanien de Mafraq, qui borde la Syrie, l’Irak et l’Arabie saoudite, fait face à des problèmes de santé particuliers en raison de sa population vulnérable. Avec deux grands camps de personnes syriennes réfugiées, Al-Mafraq et Al-Za'atari, le gouvernorat compte une importante population de personnes réfugiées provenant de la Syrie. Dans ce contexte, le CRDI a entrepris un projet visant à soutenir l’élaboration d’un registre électronique harmonisé sur la santé de la reproduction (hRHR) pour les populations réfugiées et non réfugiées à Mafraq. Le registre a été élaboré selon une approche participative qui renforce la représentation des groupes mal desservis, en particulier les personnes réfugiées, les femmes et les enfants, tout au long de la période de développement et d’essai.

À la suite de ce projet, un registre hRHR informatisé a été élaboré et déployé dans 19 établissements de santé à Mafraq. Ce registre numérise les dossiers de santé maternelle et infantile existants et est synchronisé et interopérable avec le système d’information du ministère de la Santé. Le système comprend également un registre hRHR non informatisé pour permettre une portée plus large. L’approche participative a permis au registre résultant de répondre à la situation et aux besoins des groupes vulnérables et défavorisés. Une évaluation de l’étude a montré que les femmes qui utilisent le système signalent une amélioration de la continuité des soins, de la confidentialité et de la facilité de récupération de leurs données sur la santé.
Leçons apprises
Les données sur la santé peuvent être l’actif stratégique qui aide les décisionnaires à orienter l’affectation des ressources, à repérer les lacunes et à réaliser l’impact d’une intervention. Plusieurs initiatives politiques du gouvernement jordanien visant à renforcer le SIS et à atteindre l’accès universel aux soins de santé doivent être soutenues par des recherches en cours. Les données probantes produites et les capacités de recherche renforcées sont essentielles pour obtenir un continuum rationalisé de la recherche aux politiques. Les lacunes dans la mise en œuvre des politiques, par exemple pour atteindre les personnes les plus vulnérables, peuvent ainsi être comblées grâce aux données probantes générées par la recherche et à l’amélioration de l’équité dans le système de santé.