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Reconnaître le travail de soins non rémunéré des femmes pour la sécurité alimentaire et la résilience aux changements climatiques

 

Les femmes et les filles âgées de 15 ans et plus travaillent en moyenne trois fois plus que les hommes à des tâches de soins non rémunérées dans les pays du Sud. La responsabilité disproportionnée de ce travail et son invisibilité limitent leurs possibilités d’éducation, d’emploi, de soutien aux moyens de subsistance et d’engagement politique et social. Elle affecte également leur santé, réduit leur temps libre et accroît leur vulnérabilité à la pauvreté.

Une grande partie du travail non rémunéré ou sous-payé des femmes se produit dans les zones rurales où environ 2 milliards de personnes vivent dans de petites fermes familiales et travaillent sur des parcelles de terre ne dépassant pas deux hectares. Là-bas, les femmes gèrent souvent leurs propres petites parcelles pour cultiver de la nourriture pour leur famille.

Le manque de reconnaissance du travail de soins non rémunéré est un obstacle à l’égalité d’accès des femmes rurales et urbaines aux possibilités de développement. De nouvelles données suggèrent également que les changements climatiques et la dégradation de l’environnement augmentent ce travail à la maison et sur la terre, à mesure que les événements climatiques extrêmes s’intensifient, que les ressources naturelles comme le bois de chauffage et l’eau deviennent moins disponibles et que les effets sur la santé augmentent le besoin de prendre soin des autres. La recherche souligne également les rôles cruciaux que les femmes peuvent jouer dans les efforts visant à rendre les systèmes alimentaires plus résilients, à s’adapter aux changements climatiques et à prendre soin des écosystèmes, en particulier grâce à leur travail communautaire. 

Faits saillants

  • Les femmes et les filles âgées de 15 ans et plus travaillent en moyenne trois fois plus que les hommes à des tâches de soins non rémunérées dans les pays du Sud. 
  • Le manque de reconnaissance pour ce travail est un obstacle qui entrave l’égalité d’accès des femmes aux possibilités de développement. 
  • Les femmes rurales et urbaines sont à l’avant-garde de l’action environnementale et climatique, bien qu’une grande partie de leur travail de soins non rémunérés vise à rendre les systèmes alimentaires plus résilients, à s’adapter aux changements climatiques et à prendre soin des écosystèmes.

Travail de soins non rémunéré dans les systèmes alimentaires

Le travail de soins non rémunéré des femmes est devenu un facteur clé dans la recherche financée par le CRDI au Ghana visant à accroître l’accès des petites agricultrices aux vaccins pour le bétail, en remettant en question les normes inéquitables fondées sur le genre à l’aide de discussions communautaires et du soutien de champions du genre. Le partenaire de recherche, CARE Ghana, a d’abord constaté que sa formation et ses interventions pour les agricultrices devaient tenir compte des normes de genre. Par exemple, le calendrier de séances a dû être modifié pour tenir compte du fait que les femmes étaient responsables d’un plus grand nombre de tâches domestiques et agricoles non rémunérées, ce qui les empêchait d’assister aux formations et aux activités de renforcement des capacités. Le projet a finalement réussi à modifier de nombreuses normes, notamment en reconnaissant le travail non rémunéré des femmes dans l’élevage du bétail. Cela a accru la capacité des femmes à revendiquer la propriété de leur bétail, à prendre des décisions concernant la vaccination et la vente des animaux, et à contrôler les revenus de ces ventes.

L’organisme-cadre international de CARE Ghana, CARE International, a sensibilisé le public au problème du travail de soins non rémunéré ou sous-payé dans les systèmes alimentaires du monde entier. Selon l’ONG, les deux tiers des personnes extrêmement pauvres dans le monde travaillent dans l’agriculture. Grâce à sa coalition, Decent Work for Equitable Food Systems, CARE, en collaboration avec ses partenaires, fait progresser des moyens de subsistance équitables en promouvant les droits du travail et les droits de la personne, tout en augmentant les possibilités d’emplois décents et productifs dans le secteur agroalimentaire qui génère des revenus et des salaires vitaux.

Le partenariat du CRDI avec Affaires mondiales Canada, Mettre à l’échelle les innovations en soins en Afrique, vise la mise à l’échelle des solutions en faveur de l’égalité des genres dans le travail de soins non rémunéré en Afrique subsaharienne. Bon nombre des projets de recherche de cette initiative portent sur la répartition inégale du travail de soins non rémunéré dans les milieux ruraux et agricoles.

Prendre soin de l’environnement

La crise de la pauvreté dans l’agriculture et les économies rurales est aggravée par les pressions des changements climatiques. Les gens sont contraints de quitter la campagne pour les villes à la recherche d’un travail et d’une vie meilleure, en raison de la pauvreté, des politiques économiques favorisant l’exploitation minière et l’aménagement du territoire, et des changements environnementaux. Les personnes migrantes laissent plus souvent les femmes derrière elles avec une lourde charge de travail de soins non rémunérée. Ces personnes se retrouvent parfois dans des établissements à faible revenu avec peu de services. Le nombre de personnes vivant dans ces établissements informels dépasse actuellement le milliard de personnes dans le monde, chiffre qui ne cesse d’augmenter.

Lorsque les femmes sont déplacées par les impacts climatiques et d’autres facteurs, leur travail de soins non rémunéré s’étend aux nouvelles communautés et aux nouveaux environnements dans lesquels elles se trouvent.

Des recherches financées par le CRDI dans le bassin de la rivière Reconquista, au nord-ouest de Buenos Aires en Argentine, ont mis en lumière le rôle des femmes en matière de protection de l’environnement. Originaires du nord de l’Argentine, de la Bolivie, du Paraguay et du Venezuela, ces femmes représentent maintenant une proportion importante des plus de 4 000 habitants de la municipalité de San Martin qui travaillent dans une décharge à ciel ouvert. Leur travail de soins comprend la prestation de services environnementaux, tels que la réduction, la réutilisation et le recyclage des déchets solides, l’entretien de l’eau potable, des réseaux d’égouts et des espaces verts, le nettoyage des voies navigables et le jardinage communautaire.

Une partie de la recherche, dirigée par l’Universidad Nacional de General San Martin (UNSAM), consistait à élaborer un cours diplômant sur le genre, l’environnement et le territoire suivi par 36 migrantes. Le cours, certifié par le Conseil académique de l’UNSAM, a abordé les concepts pratiques de l’environnement et du genre qui prévalent dans la région de la Reconquista et dans la vie des femmes. Il visait à leur fournir des outils pour renforcer leur rôle en tant que responsables du changement, ainsi que pour développer avec succès leurs propres projets afin que le travail de soins essentiels effectué par les femmes pour leur foyer, leur communauté et l’environnement soit reconnu, récompensé et pris en compte dans l’élaboration des politiques en vue de lutter contre les changements climatiques.

Agir sur les soins et les changements climatiques

Depuis, le CRDI s’est associé à la Fundación Avina pour soutenir de nouvelles recherches portant sur l’intersection des soins et des changements environnementaux et climatiques. Alors que les changements climatiques affectent de manière disproportionnée les personnes les plus vulnérables, en particulier les femmes et les filles des pays du Sud, les femmes sont également au premier plan de l’action environnementale et climatique. Une grande partie de leur travail de soins axés sur la communauté, comme le reboisement, la remise en état des terres, le compostage et la protection de l’eau et de la biodiversité, contribue à l’action climatique et à l’adaptation. Une grande partie de ce travail est également non rémunérée.

Il est essentiel de lutter ensemble contre le travail de soins rémunéré et non rémunéré et les changements climatiques. Pourtant, les liens entre ces deux questions ont été négligés dans les politiques, les programmes et la recherche. La Fundación Avina rassemblera des données probantes sur les soins et le climat, et elle tirera des enseignements de pratiques concrètes qui abordent les deux, y compris celles proposées par les organisations autochtones, féministes et populaires.