Financer la résilience climatique avec des instruments financiers innovants

En 2018, les Seychelles sont devenues le premier pays à financer la conservation par le biais d’un échange dette-nature. Il a échangé une dette de 21,6 millions de dollars américains contre la création de deux grandes réserves naturelles marines. Une partie de sa dette nationale a été vendue à un taux réduit à Nature Conservancy et à d’autres fondations philanthropiques. Cela a permis aux Seychelles d’accroître leur résilience climatique tout en économisant environ 2 millions de dollars américains par an en frais de service de la dette.
Les échanges dette-nature ne sont qu’un exemple parmi d’autres d’instruments financiers novateurs dont les pays en développement ont besoin pour s’adapter aux changements climatiques. Une telle réflexion originale est nécessaire pour faire face à la crise climatique, car les sources de financement publiques – telles que les budgets nationaux et le financement de l’aide mondiale – et l’investissement privé restent limitées. Le secteur privé a été lent à réagir parce que les risques et les rendements financiers sont incertains, en particulier pour les investissements qui aideront les communautés des pays en développement à s’adapter.
Combler le déficit de financement climatique
Selon la dernière évaluation du Programme des Nations Unies pour l’environnement, le coût de l’adaptation aux changements climatiques pour les pays en développement est maintenant de 10 à 18 fois plus élevé que les flux actuels de financement public . L’écart entre ce qui est nécessaire et ce qui est disponible varie de 194 à 366 milliards de dollars américains par an.
Pour combler cette lacune, il existe un intérêt mondial croissant pour les instruments financiers innovants, qui comprennent également des fonds d’investissement communs, des obligations résilientes au climat, des prêts verts et des services d’assurance. Ces instruments offrent de nouvelles façons d’acquérir, de structurer, de gouverner et d’allouer des financements pour l’action climatique. Au lieu de s’appuyer sur des sources publiques, ils permettent aux gouvernements et aux promoteurs de projets d’exploiter des fonds provenant de nouvelles sources, telles que des investisseurs privés, des fonds de pension, des investisseurs d’impact à vocation sociale ou des philanthropes. Dans certains cas, ils sont combinés à des sources de financement traditionnelles telles que les subventions et les prêts.
La recherche appuyée par le CRDI produit des outils et des conseils pour aider les pays en développement et leurs partenaires financiers à explorer des approches novatrices pour financer les priorités nationales en matière d’action climatique. En Afrique du Sud, la recherche aide à mettre à l'essai une nouvelle approche de financement qui permettra aux municipalités de mieux gérer les risques climatiques.
Des outils pour explorer les financements climatiques innovants
De récentes recherches financées par le CRDI et menées par l’Institut international du développement durable (IIDD) ont produit de nouvelles ressources sur les instruments financiers novateurs afin d’aider les pays en développement à mieux les utiliser. L’équipe a produit la première analyse des stratégies nationales de financement pour l’adaptation, en donnant des conseils sur la façon d’utiliser ces stratégies pour augmenter le financement qui est aligné sur les objectifs nationaux de développement et d’adaptation.
La recherche dirigée par l’IIDD a également comblé une lacune cruciale dans les connaissances pour ceux qui cherchent de nouvelles façons de financer l’adaptation en produisant un inventaire complet d’instruments financiers novateurs. Les études de cas liées à l’inventaire donnent aux utilisatrices et aux utilisateurs des exemples concrets de la façon dont ces nouvelles approches de financement peuvent relever des défis d’adaptation spécifiques.
L’IIDD a également entrepris la première évaluation systématique de la façon dont les portefeuilles d’investissement des banques multilatérales de développement (BMD) s’alignent sur les objectifs d’action climatique des pays en développement. Alors que les leaders du G20 demandent à ces banques d’accroître leur rôle dans le financement de l’action climatique, cette recherche revêt une nouvelle importance. Entre autres choses, la recherche souligne la nécessité pour les BMD de recourir davantage à des instruments financiers novateurs.
Une nouvelle façon de financer l’action climatique au niveau local
De nouvelles approches de financement sont également nécessaires pour renforcer la résilience au niveau local. Les villes d’Afrique du Sud, par exemple, ont du mal à gérer les coûts croissants des inondations. En 2020, l’Université du KwaZulu-Natal a exploré la faisabilité d’une installation municipale de mise en commun des risques pour gérer les risques d’inondation dans six municipalités sud-africaines. Pour les événements catastrophiques peu fréquents, la mise en commun des risques offre une alternative moins coûteuse et plus flexible aux formes d’assurance traditionnelles. Il permet aux villes d’éviter des coûts catastrophiques en cotisant à un fonds commun qui indemnise les membres en cas de perte ou de dommages.
Les équipes de recherche ont élaboré un cadre — le premier du genre — pour la mise en commun des risques au niveau infranational. Grâce à l’assistance technique de l’équipe du projet, la municipalité de Drakenstein travaille actuellement à la mise en place d’une installation de mise en commun des risques avec l’appui du Trésor de la province de Western Cape. Pendant ce temps, grâce à un partenariat avec le réseau C40 Cities, l’équipe explore une utilisation plus large du cadre pour gérer les risques d’inondation.
Une mine de recherches sur le financement climatique
Depuis 2012, le CRDI soutient la recherche et le renforcement des capacités afin d’accroître l’accès des pays en développement au financement de l’action climatique. La note de synthèse Mobiliser les connaissances et les capacités pour financer l’action climatique dans les pays du Sud résume les conclusions de cet ensemble de recherches, notamment sur :
- les besoins, obstacles et opportunités en matière de financement climatique;
- le financement du secteur privé, en particulier pour l’adaptation;
- le renforcement des capacités en matière de financement climatique;
- les approches inclusives du financement de l’action climatique.
Collaborateur : Bhim Adhikari, spécialiste principal de programme, CRDI