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Développement et production à grande échelle d’un vaccin contre la péripneumonie contagieuse bovine

 

Au Kenya et au Canada, des chercheurs ont collaboré avec des fabricants de vaccins, des organismes gouvernementaux de réglementation et des organisations panafricaines afin de préparer la voie à la production de masse d’un vaccin pratique et abordable contre la péripneumonie contagieuse bovine (PPCB). C’est une première mondiale : l’équipe de projet a mis au point un vaccin contre la PPCB sûr et très efficace, qui prolonge l’immunité, réduit les effets secondaires, est facile à stocker et à transporter et ne nécessite aucune réfrigération – ce qui le rend pratique et accessible pour les petits éleveurs de bétail au Kenya et dans d’autres pays d’Afrique.

Développer un vaccin efficace et abordable

La PPCB est une maladie respiratoire du bétail très contagieuse, qui a une incidence importante sur l’économie et le commerce dans toute l’Afrique. Chaque année, cette maladie touche le bétail d’environ 24 millions d’agriculteurs africains – principalement des gens à faible revenu – et entraîne des pertes s’élevant à au moins 60 millions de dollars américains. Il existe déjà un vaccin contre la PPCB sur le marché, mais il n’est efficace que sur environ 22 % des bovins, peut avoir de graves effets secondaires, ne protège que pour une courte durée et nécessite une réfrigération, ce qui en fait une solution peu pratique dans bon nombre de régions d’Afrique.

Dans le cadre d’un projet antérieur appuyé par le Fonds canadien de recherche sur la sécurité alimentaire internationale (FCRSAI), des chercheurs canadiens et kenyans ont mis au point trois vaccins candidats prometteurs. Cette deuxième phase du projet a permis la réalisation d’études plus approfondies, qui étaient nécessaires pour déterminer quel vaccin et quelle formulation offraient la meilleure protection contre la PPCB et pouvaient être fabriqués en série à un coût abordable. « Nous sommes convaincus que la vaccination est le meilleur moyen de contrôler la PPCB et d’améliorer la sécurité alimentaire des petits éleveurs de bovins qui sont touchés de façon disproportionnée par cette maladie », a affirmé Jane Wachira, première dirigeante de l’Institut de production de vaccins vétérinaires du Kenya (KEVEVAPI). « Notre objectif est de mettre ce vaccin à la disposition des agriculteurs africains dès que possible. » [Traduction]

À cette fin, des formulations du vaccin expérimental ont été testées et comparées au vaccin existant, dans le cadre d’essais sur les animaux. Des protéines ingéniérisées (appelées protéines chimériques ou protéines hybrides) ont été produites afin de réduire le nombre de composants de l’antigène dans le nouveau vaccin (et donc le coût par dose). Des processus ont ensuite été mis au point pour prélever l’antigène, l’isoler et le purifier.

Laboratoires vétérinaires centraux, Nairobi, Kenya
CRDI / Bartay

Une machine de traitement à haute capacité a été achetée – c’est la première du genre en Afrique subsaharienne, et elle permet de tester 9 600 échantillons en 45 minutes, processus qui prenait des jours, voir des semaines avec les méthodes utilisées jusque-là. Cet appareil permettra d’accélérer le diagnostic, de réduire le nombre de faux positifs, d’abaisser le coût du traitement, et d’améliorer les programmes de surveillance et de contrôle. Un centre de développement de produits a ouvert ses portes au Kenya, et son personnel a reçu la formation nécessaire pour produire les antigènes dans le pays.

Un contrat de licence relatif à la production commerciale et à la commercialisation a été conclu entre le KEVEVAPI et trois institutions titulaires de droits de propriété intellectuelle : l’Agricultural and Livestock Research Organization du Kenya (KALRO), l’Institut international de recherche sur l’élevage et le Vaccine and Infectious Disease Organization-International Vaccine Centre de l’Université de la Saskatchewan.

Surmonter les obstacles sociaux et économiques afin de favoriser l’utilisation du vaccin à grande échelle

Une fois un vaccin efficace contre la PPCB mis au point, il s’est avéré nécessaire de recenser les facteurs socio-économiques susceptibles d’augmenter la probabilité d’utilisation du nouveau vaccin par les exploitants agricoles. Le projet fait également appel à des spécialistes en sciences sociales et à des économistes pour surmonter les problèmes liés à la réglementation, à la sexospécificité ou aux coûts qui pourraient nuire à la diffusion et à l’acceptation du vaccin.

Dans le comté de Laikipia, au Kenya, les plus hautes autorités nationales et infranationales ont contribué à la mise en garde des agriculteurs contre le risque de PPCB, dans le cadre d’une campagne de sensibilisation à fort impact qui a bénéficié d’une couverture médiatique nationale. Bien que la plupart des propriétaires de bétail considèrent la vaccination comme la seule mesure efficace de contrôle de la PPCB, la couverture vaccinale est faible dans les zones où la maladie est endémique. Des études ont révélé que l’utilisation du vaccin actuel par les agriculteurs dépend du nombre de bovins qu’ils possèdent, de l’âge du propriétaire du bétail, du revenu et de la taille du ménage, et enfin des antécédents de PPCB dans le troupeau. Des études sur la volonté de payer ont montré que les éleveurs de bétail sont généralement disposés à payer pour des vaccins contre la PPCB, mais que leur capacité à le faire dépend du coût des vaccins en question.

Les analyses coûts-avantages fournissent une justification opérationnelle solide de l’intérêt de l’achat du vaccin pour les agriculteurs pauvres et de l’utilisation de fonds publics pour contrôler la maladie. Le vaccin devrait avoir une incidence positive sur la productivité alimentaire, en réduisant le nombre de bovins contaminés, en renforçant la stabilité des prix du marché, en abaissant le coût des interventions visant à contrôler la propagation de la maladie, et en réduisant la dépendance à l’égard des antibiotiques. Cela permettra d’économiser de l’argent et de réduire le risque de développement de la résistance aux antibiotiques.

Éclairer les politiques

Une étude a révélé qu’au vu du contrôle exercé au moyen du vaccin actuel, le taux d’infection à la PPCB devrait passer de 14 à 18 % d’ici 2030. La nécessité de renforcer la réglementation et la coordination entre le gouvernement national et les comtés relativement à la vaccination contre la PPCB a été mise en évidence, tout comme la nécessité d’accroître la sensibilisation à l’égard des stratégies nationales, régionales et internationales de contrôle de la PPCB.

L’équipe de projet a préparé au Kenya une stratégie de contrôle de la PPCB et un plan de contingence connexe, et a organisé à l’échelle nationale une formation sur la surveillance de la PPCB, en collaboration avec le Bureau interafricain pour les ressources animales de l’Union africaine.

Et ensuite?

Les scientifiques de la KALRO ont reçu du gouvernement kenyan un prix récompensant l’excellence en matière de service public, en reconnaissance de leur remarquable engagement en faveur du développement du vaccin. La KALRO a engagé la moitié des fonds nécessaires (2,5 millions de dollars canadiens) nécessaires à la réalisation d’un essai à grande échelle sur du bétail commercial, afin d’évaluer le caractère sécuritaire du vaccin, son efficacité et la durée de la protection conférée. La production commerciale devrait commencer en 2019.

Merck a fourni un financement qui permettra à la KALRO et au KEVEVAPI de poursuivre la production de masse limitée d’antigènes. L’augmentation de la production fait actuellement l’objet de consultations avec Merck. Les partenariats de fabrication seront élargis à d’autres entreprises africaines et européennes.

Le FCRSAI est financé conjointement par le Centre de recherches pour le développement international et Affaires mondiales Canada.

Détails sur le projet et ses résultats.