Connecter les collectivités isolées au Vietnam afin d’améliorer les soins de santé

Les téléphones mobiles sont utilisés pour communiquer des renseignements médicaux essentiels aux femmes issues de groupes ethniques minoritaires au Vietnam.
N’ayant pas accès aux services classiques de soins à la mère et à l’enfant en raison de leur situation géographique, de leur langue, de leur niveau d’éducation et de leur pauvreté, ces femmes connaissent un taux de mortalité beaucoup plus élevé que celui de la population de la majorité Kinh.
Les chercheurs de l’Institute of Population, Health and Development (PHAD) du Vietnam ont mis à l’essai un programme novateur de santé mobile à l’intention de ces populations reculées. Mise à l’essai dans huit communes du district montagneux de Dinh Hoa de la province Thaï Nguyen, au nord-est du Vietnam, la plateforme mMOM a offert aux femmes des conseils sur la grossesse et les soins aux nouveau-nés, et ainsi accru leur niveau de sensibilisation et de connaissances et la mise en pratique de ces recommandations. Grâce à cette plateforme, les travailleurs de la santé du village et le personnel du centre de santé communautaire ont pu renforcer leurs compétences et acquérir de nouvelles connaissances, ce qui s’est traduit par une amélioration globale du système de santé du district.
Présentation de la santé mobile
Le Vietnam a fait de grands progrès en matière de santé maternelle et infantile, mais la situation des groupes minoritaires ethniques est loin d’avoir évolué au même rythme. Selon les données de recensement, leurs taux de fécondité et de mortalité infantile sont plus élevés, et leur espérance de vie est plus faible.
Le Vietnam a bien étendu ses réseaux de téléphonie mobile. Au début de 2016, environ 93% des Vietnamiens avaient un téléphone cellulaire. Avec le soutien du CRDI, une équipe de chercheurs du PHAD s’est efforcée de déterminer si la mise en oeuvre d’une intervention intégrée en santé à l’aide de téléphones mobiles améliorerait l’accès aux services de santé maternelle et infantile pour les femmes issues de minorités ethniques.
La province de Thaï Nguyen a été choisie parce qu’un système d’information de gestion de la santé venait d’être implanté. En effet, tous les hôpitaux et 181 communes de neuf districts bénéficiaient d’un système de gestion de documents électroniques. Tous les centres de santé communautaires étaient également connectés par câble à haut débit aux centres de santé du district et de la province. Le projet a été reçu avec enthousiasme par les responsables et le personnel de santé de la province, du district, de la commune et du village.
Tendre la main aux mères
Les premiers sondages ont révélé que la distance et le manque de temps empêchaient les femmes enceintes de Thaï Nguyen de se rendre aux centres de soins de santé. Certaines ont fait part de leur crainte d’y mettre les pieds. Les sondages ont également montré que les fournisseurs en soins de santé n’avaient pas le temps de bien expliquer aux patientes tout ce qu’elles doivent savoir en matière de soins prénatals et postnatals. D’ailleurs, les renseignements fournis ne correspondent souvent pas au stade de la grossesse.
Pour aborder ces problèmes, l’équipe de recherche a établi un centre d’information sur la santé maternelle et infantile afin de fournir aux femmes de l’information essentielle sur la grossesse, les soins prénatals, l’accouchement et les soins aux nourrissons. Environ 820 femmes enceintes ou jeunes mères de huit communes ont participé au projet.
Chaque femme a reçu 75 messages texte au cours de la grossesse et l’année suivant l’accouchement. Ces messages unidirectionnels ont fourni des renseignements essentiels en matière de santé. Par exemple, il a été rappelé aux jeunes mères que l’immunisation de leur bébé était gratuite au centre local. Il a été rappelé aux femmes enceintes de prendre du fer et d’autres suppléments pendant leur grossesse. Comme le centre de soins de santé faisait un suivi auprès des femmes qui ne répondaient pas aux messages, aucune femme n’a abandonné le programme en cours de route.
De meilleures connaissances et relations
L’ensemble des participantes des huit communes ont indiqué que les messages leur avaient fourni des renseignements précieux au cours des périodes déterminantes de leur grossesse et dans les premières semaines qui avaient suivi la naissance de leur bébé. Les informations les plus appréciées concernaient la vaccination, la nutrition, les ultrasons, l’allaitement et la transition à une alimentation solide. Elles ont trouvé qu’il était pratique de recevoir ces renseignements sur leur téléphone mobile et que souvent elles n’avaient ainsi pas besoin de se rendre au centre de soins de santé.
L’amélioration de leurs connaissances sur la grossesse et la maternité s’est traduite par de meilleures relations avec les travailleurs de la santé. Bon nombre d’entre elles ont indiqué les avoir plus fréquemment appelé, non seulement pour discuter de leur santé, mais également pour celle des autres enfants ou des autres membres de la famille.
La plateforme mMOM a également modifié la dynamique de la famille, car les femmes discutaient souvent des messages reçus avec leur mari, ce qui est assez rare dans une société où la santé maternelle et infantile est un domaine traditionnellement réservé aux femmes.
Les avantages s’étendent même au système de santé
Le projet mMOM a suscité un soutien unanime chez les travailleurs de santé communautaire, car, selon eux, il a amélioré leur capacité à faire le suivi des grossesses et de la santé des nourrissons tout en renforçant leurs connaissances techniques et sanitaires.
Le projet mMOM s’est terminé fin 2016, mais il a été relancé grâce au soutien financier et technique du département de la santé de la province de Thaï Nguyen, cogestionnaire de l’intervention. Les leçons tirées du projet mMOM orienteront les efforts visant à déployer à grande échelle des entreprises de cybersanté maternelle au Vietnam. Le ministère de la Santé a indiqué qu’il souhaitait vivement présenter ce modèle à d’autres départements de la santé provinciaux.
Quant aux mères de la province de Thaï Nguyen, elles aimeraient vraiment que le programme se poursuive. Une jeune mère a indiqué qu’elle souhaitait participer au programme lors de sa prochaine grossesse en expliquant que le temps d’élever son enfant elle aurait peut-être oublié certaines choses. La plupart des femmes sont même prêtes à payer ce service malgré leur situation financière.


