Commerce, emplois et salaires: L'exportation a-t-elle une incidence sur les pauvres en Afrique du Sud ?
16 décembre 2010
Mondialisation oblige, l’exportation est désormais une stratégie privilégiée pour favoriser l’emploi et la hausse des salaires dans les pays en développement. Depuis quelques décennies, la libéralisation de l’économie et la stimulation du commerce ont été, et demeurent, un des principaux objectifs des responsables des politiques de l’Afrique du Sud et d’autres pays subsahariens. À l’échelle mondiale, la part du commerce dans le produit intérieur brut (PIB) n’a cessé d’augmenter depuis les années 1980; elle dépasse depuis peu les 60 % en Afrique subsaharienne [i].
La hausse des exportations peut procurer certains bénéfices : devises étrangères pour payer les importations, économies d’échelle, possibilité d’« apprentissage par l’exportation », hausse de la productivité et implantation possible de nouvelles entreprises créatrices d’emploi. Reste à savoir si l’exportation peut créer des emplois pour les pauvres. Quelles industries, entreprises ou destinations devrait-on privilégier pour atteindre cet objectif stratégique ? Cette fiche traite de l’un de ces facteurs : quel type de destination d’exportation est associé à de meilleurs emplois pour les pauvres ?
Les exportations n’ont pas toutes les mêmes répercussions sur la demande de main-d’œuvre — la destination d’exportation devrait entrer en ligne de compte dans les politiques de stimulation du commerce destinées à réduire le chômage.
Les faits
Une recherche appuyée par MCP a approfondi les liens entre les schémas d’exportation, les emplois et les salaires en Afrique du Sud et dans d’autres pays de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC)[ii]. Des écrits sur le commerce ont déjà souligné l’avantage salarial procuré par les entreprises exportatrices. Les plus récentes études ont constaté un lien entre l’intensité et la destination des exportations, et des salaires supérieurs. Cette hypothèse donne à croire que les entreprises qui exportent vers des pays riches attirent une main-d’oeuvre plus qualifiée et versent des salaires plus élevés. L’Afrique du Sud est un cas intéressant puisqu’elle possède deux marchés d’exportation distincts : les autres pays de la SADC, où les revenus par habitant sont faibles, et l’Union européenne et les États-Unis, où les revenus sont les plus élevés au monde (voir la figure). L’hypothèse de recherche voulait que l’Afrique du Sud exporte des produits bon marché (de faible qualité) vers les premiers et des produits chers (et donc de grande qualité) vers les deuxièmes, et que les travailleurs des entreprises exportant vers des destinations où les revenus par habitant sont élevés (qui consomment des biens de meilleure qualité) gagnent davantage. La recherche a confirmé l’incidence de l’exportation sur les salaires : les travailleurs des entreprises sud-africaines exportatrices gagnent en moyenne 21 % de plus que les travailleurs des entreprises non exportatrices. En ce qui concerne les salaires, si les exportations importent, la destination d’exportation importe aussi : les salaires sont plus élevés dans les entreprises exportant à l’extérieur de la SADC que chez celles exportant vers d’autres pays de la Communauté. Les estimations montrent que les entreprises sud-africaines qui exportent partout au monde versent des salaires plus élevés que celles qui approvisionnent le marché intérieur, tandis que celles qui exportent vers des pays de la SADC versent des salaires moindres. La situation est semblable dans quatre autres pays de la SADC — le Botswana, la Namibie, le Swaziland et la Zambie — où les travailleurs des entreprises qui exportent à l’extérieur de la région gagnent davantage. Toutefois, dans ces pays, les salaires dans les entreprises exportant dans la SADC sont semblables à ceux des entreprises ne produisant que pour le marché intérieur. Des choix décisifs
Toute stratégie de croissance qui cherche à réduire les niveaux élevés de chômage et à accroître les salaires de la main-d’œuvre non qualifiée doit viser un développement accru du secteur privé et une croissance des exportations. Dans le cas de la SADC, le tarif extérieur commun et les frais de transport protègent les entreprises sud-africaines contre la concurrence internationale. Le contexte commercial actuel dans la SADC profite aux entreprises sud-africaines qui produisent des biens de moindre qualité et à leurs employés sud-africains peu qualifiés. Une pénétration accrue de l’Afrique du Sud sur les riches marchés de l’OCDE entraînera une augmentation des salaires des travailleurs sud-africains. De plus, étant donné la qualité moindre des produits destinés aux pays de la SADC, il est peu probable que la Communauté puisse servir de tremplin aux produits sud-africains pour percer les marchés d’exportation internationaux. La SADC pourrait toutefois permettre aux entreprises de ses autres pays membres d’exploiter ses propres marchés, ce qui les aiderait à contrer la concurrence sud-africaine sur ce marché régional et donc à produire davantage d’emplois pour les travailleurs peu qualifiés dans leurs économies.
[i] Organisation internationale du travail, Rapport mondial sur les salaires 2008-2009.
[ii] La fiche s’inspire des recherches du projet no 104443, Amélioration de la situation des pauvres sur le marché du travail en Afrique subsaharienne (Ghana, Madagascar, Afrique du Sud et Tanzanie). Les constatations sont résumées dans Export destination, product quality and wages in a middle-income country. The case of South Africa, par Neil Rankin et Volker Schöer, 2009. Télécharger le PDF : Commerce, emplois et salaires: L’exportation a-t-elle une incidence sur les pauvres en Afrique du Sud ?
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Une recherche appuyée par MCP a approfondi les liens entre les schémas d’exportation, les emplois et les salaires en Afrique du Sud et dans d’autres pays de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC)[ii]. Des écrits sur le commerce ont déjà souligné l’avantage salarial procuré par les entreprises exportatrices. Les plus récentes études ont constaté un lien entre l’intensité et la destination des exportations, et des salaires supérieurs. Cette hypothèse donne à croire que les entreprises qui exportent vers des pays riches attirent une main-d’oeuvre plus qualifiée et versent des salaires plus élevés. L’Afrique du Sud est un cas intéressant puisqu’elle possède deux marchés d’exportation distincts : les autres pays de la SADC, où les revenus par habitant sont faibles, et l’Union européenne et les États-Unis, où les revenus sont les plus élevés au monde (voir la figure). L’hypothèse de recherche voulait que l’Afrique du Sud exporte des produits bon marché (de faible qualité) vers les premiers et des produits chers (et donc de grande qualité) vers les deuxièmes, et que les travailleurs des entreprises exportant vers des destinations où les revenus par habitant sont élevés (qui consomment des biens de meilleure qualité) gagnent davantage. La recherche a confirmé l’incidence de l’exportation sur les salaires : les travailleurs des entreprises sud-africaines exportatrices gagnent en moyenne 21 % de plus que les travailleurs des entreprises non exportatrices. En ce qui concerne les salaires, si les exportations importent, la destination d’exportation importe aussi : les salaires sont plus élevés dans les entreprises exportant à l’extérieur de la SADC que chez celles exportant vers d’autres pays de la Communauté. Les estimations montrent que les entreprises sud-africaines qui exportent partout au monde versent des salaires plus élevés que celles qui approvisionnent le marché intérieur, tandis que celles qui exportent vers des pays de la SADC versent des salaires moindres. La situation est semblable dans quatre autres pays de la SADC — le Botswana, la Namibie, le Swaziland et la Zambie — où les travailleurs des entreprises qui exportent à l’extérieur de la région gagnent davantage. Toutefois, dans ces pays, les salaires dans les entreprises exportant dans la SADC sont semblables à ceux des entreprises ne produisant que pour le marché intérieur. Des choix décisifs
Toute stratégie de croissance qui cherche à réduire les niveaux élevés de chômage et à accroître les salaires de la main-d’œuvre non qualifiée doit viser un développement accru du secteur privé et une croissance des exportations. Dans le cas de la SADC, le tarif extérieur commun et les frais de transport protègent les entreprises sud-africaines contre la concurrence internationale. Le contexte commercial actuel dans la SADC profite aux entreprises sud-africaines qui produisent des biens de moindre qualité et à leurs employés sud-africains peu qualifiés. Une pénétration accrue de l’Afrique du Sud sur les riches marchés de l’OCDE entraînera une augmentation des salaires des travailleurs sud-africains. De plus, étant donné la qualité moindre des produits destinés aux pays de la SADC, il est peu probable que la Communauté puisse servir de tremplin aux produits sud-africains pour percer les marchés d’exportation internationaux. La SADC pourrait toutefois permettre aux entreprises de ses autres pays membres d’exploiter ses propres marchés, ce qui les aiderait à contrer la concurrence sud-africaine sur ce marché régional et donc à produire davantage d’emplois pour les travailleurs peu qualifiés dans leurs économies.
[i] Organisation internationale du travail, Rapport mondial sur les salaires 2008-2009.
[ii] La fiche s’inspire des recherches du projet no 104443, Amélioration de la situation des pauvres sur le marché du travail en Afrique subsaharienne (Ghana, Madagascar, Afrique du Sud et Tanzanie). Les constatations sont résumées dans Export destination, product quality and wages in a middle-income country. The case of South Africa, par Neil Rankin et Volker Schöer, 2009. Télécharger le PDF : Commerce, emplois et salaires: L’exportation a-t-elle une incidence sur les pauvres en Afrique du Sud ?
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