Améliorer la sécurité de l’eau et atténuer les risques climatiques dans les villes côtières de l’Angola
Des millions de personnes ont fui les zones rurales angolaises pour s’établir dans les villes côtières au cours des 27 années de guerre civile qu’a connu le pays. La plupart se sont installés sur des terres écologiquement fragiles en périphérie des villes : terres côtières basses, plaines inondables et ravins escarpés vulnérables aux inondations et aux glissements de terrain. Aujourd’hui, plus de la moitié des 31 millions d’habitants de l’Angola vivent dans des zones côtières urbaines et des plaines inondables qui sont vulnérables aux événements climatiques.
Les représentants municipaux de ces régions doivent faire face à deux défis majeurs : fournir un approvisionnement en eau adéquat et des logements sûrs à leurs populations déplacées par la guerre, et s’adapter à des phénomènes climatiques extrêmes plus fréquents et plus intenses. Ces défis sont compliqués par le fait que 98 % des stations météorologiques du pays ainsi que leurs riches registres de données climatiques ont été détruits pendant la guerre.
Entre 2012 et 2014, le Centre de recherches pour le développement international (CRDI) a appuyé l’organisation non gouvernementale Development Workshop Angola pour combler cet important manque de données. En étroite collaboration avec des urbanistes, des décideurs et des collectivités vulnérables, Development Workshop Angola a mené des recherches dans les villes côtières de Luanda et Cabinda ainsi que dans les villes jumelles de Benguela et Lobito. Ensemble, ils ont déterminé les collectivités les plus vulnérables, où les catastrophes naturelles sont les plus susceptibles de se produire, et comment les changements climatiques peuvent aggraver ces problèmes.
Déterminer les risques et la variabilité climatiques
Les chercheurs ont créé une base de données climatiques nationale à partir d’archives et de témoignages qui reconstruit près de 30 ans de données météorologiques perdues pendant la guerre. La base de données permet de mieux comprendre les conditions météorologiques passées et les projections présentes et futures des risques liés aux changements climatiques. Dans les villes côtières de l’Angola, l’intensité et la variabilité des événements climatiques tels que les tempêtes de pluie et les inondations ont plus que doublé au cours des 60 dernières années.
Cartographie participative des risques auxquels s’exposent les collectivités
L’équipe de recherche a utilisé des images satellites et des méthodes de recherche participative pour élaborer des cartes détaillées des risques liés au climat qui menacent les quatre villes côtières, notamment les inondations, l’érosion, l’élévation du niveau de la mer, les ondes de tempête et l’intrusion d’eau salée. L’équipe a fait du porte-à-porte pour mener des enquêtes auprès des ménages dans les collectivités touchées et a organisé des discussions de groupe pour valider les données. La recherche a montré que la participation directe des collectivités et des autorités municipales permet de définir plus facilement les mesures qui prennent en compte des défis locaux précis, réduisant ainsi la vulnérabilité.
Les représentants municipaux utilisent les cartes des risques pour orienter la planification urbaine et déterminer où des mesures doivent être prises pour protéger les collectivités. Par exemple, les cartes ont révélé que plus de 12 % des ménages de Luanda étaient vulnérables à l’érosion et aux inondations, y compris dans les zones côtières. Dans les trois autres villes, 40 à 50 % de la population n’avait pas un accès adéquat à de l’eau propre, ce qui entraîne des cas fréquents de paludisme, de diarrhée et de choléra dus à de mauvaises conditions sanitaires et à une eau polluée et rare.
Planification des inondations et mesures d’intervention
Les chercheurs ont travaillé avec la Section des changements climatiques de la Direction nationale de l’environnement pour établir un système d’alerte rapide en cas d’inondation dans le sud-ouest de l’Angola. Il s’agissait de recueillir des données à partir des échelles de crue télécommandées et de les transmettre au ministère de la Protection civile pour faciliter la planification des inondations et les mesures d’intervention. En 2015 et 2016, Development Workshop Angola a travaillé avec les ministères de l’Environnement et de l’Administration territoriale à Benguela et à Lobito pour donner des conseils sur les risques de tempêtes et d’inondations en prévision des tempêtes majeures. Une combinaison d’images satellites en temps quasi réel et les résultats des évaluations préliminaires des risques ont été utilisés pour suivre les tempêtes qui approchaient, avertir les collectivités et évacuer des centaines de familles. Ces événements extrêmes soulignent l’importance des évaluations des risques, des cartes municipales des risques et des systèmes d’alerte rapide pour éclairer les mesures de protection des collectivités.
Amélioration de la disponibilité et de l’abordabilité de l’eau
Le résultat le plus important de la recherche pour les populations urbaines vulnérables de l’Angola est l’amélioration de la disponibilité et de l’abordabilité de l’eau pour les ménages. Dans trois quartiers de Luanda, les consommateurs ont élu des gardiens de l’approvisionnement en eau pour créer des associations qui perçoivent des frais d’utilisation, gèrent l’entretien et achètent de l’eau en vrac aux entreprises provinciales parapubliques de distribution de l’eau. Il en a résulté un accès accru à l’eau potable et une réduction de 90 % du coût. Cette approche garantit que les comités élus à l’échelle locale financent l’entretien des points d’eau en percevant des droits pour les services et jouent un rôle actif pour faire la promotion de l’hygiène et d’installations sanitaires de base. Le gouvernement a intégré ce modèle à une politique de « l’eau pour tous » et il l’a reproduit partout dans le pays.
Effets à long terme
La base de données probantes et les leçons tirées de cette recherche financée par le CRDI ont aidé Development Workshop Angola à obtenir des fonds supplémentaires pour travailler dans deux autres villes côtières (Soyo et Namibe), où ils cartographient les risques climatiques et élaborent des stratégies locales d’adaptation pour rendre les villes plus résilientes. Development Workshop Angola a également coopéré avec le ministère national pour la Résilience urbaine (créé en 2018) afin de lui communiquer les données du projet et d’assurer leur utilisation. En reconnaissance de leur expertise, le gouvernement angolais a demandé à Development Workshop Angola de l’aider à élaborer une stratégie nationale et un plan d’action sur les changements climatiques.