Aider les femmes à se remettre sur pied après l’impact de la pandémie de COVID-19 sur leur vie, leurs moyens de subsistance et leur santé
Les moyens de subsistance des femmes ont été touchés de manière disproportionnée au plus fort de la pandémie de COVID-19. Elles ont connu une insécurité accrue en raison de la perte de revenus et d’un risque accru de violence fondée sur le genre. Elles ont également été aux prises avec le fardeau accru des responsabilités de soins non rémunérés pour leurs familles en raison des fermetures imposées par la COVID-19 aux écoles, de la fermeture de lieux de travail non essentiels et des soins aux membres malades de la famille.
Dans les régions rurales d’Afrique du Sud, les conséquences de la COVID-19 ont laissé les femmes de Kwelerha, une petite ville, aux prises avec des revenus en baisse et la hausse des coûts des marchandises pour soutenir leur commerce et leurs entreprises du secteur informel. Pour subvenir aux besoins de leur famille, ces femmes, en particulier celles qui n’avaient pas accès à l’aide gouvernementale, ont utilisé d’autres sources de revenus comme le jardinage domestique, la vente d’aliments cuits, l’élevage de bétail et la gestion de magasins de type « spaza » (des commerces de proximité informels généralement gérés à domicile).
La pandémie a également creusé l’écart dans l’accès aux services de santé de routine pour les femmes des zones rurales d’Afrique du Sud, rendant des situations déjà difficiles tout à fait insurmontables pendant la pandémie de COVID-19. Mandy*, une femme de 60 ans vivant dans une zone rurale du Cap-Oriental, a été amputée d’une jambe en 2021 à la suite d’un diagnostic de diabète instable, ce qui l’a laissée incapable de travailler, et elle ne dépendait que d’une allocation d’invalidité du gouvernement pour survivre. Elle est confrontée à de nombreux défis, allant des frais de transport élevés pour se rendre à l’établissement médical le plus proche à 40 km de son domicile pour ses examens de santé, ses médicaments et ses séances de physiothérapie, à l’obtention de l’approbation d’une jambe artificielle pour lui permettre de se déplacer sans aide ni fauteuil roulant.
Appuyée par le CRDI, Instituts de recherche en santé du Canada et le Conseil de recherches en sciences humaines, l’initiative « Les femmes S’ÉLÈVENT » s’attaque aux répercussions sexospécifiques de la COVID-19. Cette initiative soutient la recherche transformatrice de genre axée sur l’action portant sur la façon dont la santé des femmes et leur travail (rémunéré ou non) se recoupent et interagissent dans le contexte de la préparation à la COVID-19, de la réponse et de la reprise.
Permettre l’autonomisation des femmes et leur capacité à reconstruire en mieux dans les régions rurales d’Afrique du Sud
Dans les pays d'Afrique du Sud, le projet Ukuvula Isango, mis en œuvre par le Human Sciences Research Council (Afrique du Sud) et l’Université McGill (Canada) se concentre sur l’impact avant, pendant et après la pandémie de COVID-19 sur les moyens de subsistance et l’état de santé des femmes et de leurs collectivités rurales, comme Mandy et les femmes de Kwelerha susmentionnées.

Les restrictions en matière de distanciation sociale et les réductions des revenus en raison de la perte d’emploi occasionnée par la COVID-19 ont limité la capacité des femmes à accéder aux services de santé. Dans certaines collectivités, les services des cliniques mobiles ont été complètement arrêtés ou considérablement réduits au point où les demandes de santé communautaire ne pouvaient pas être satisfaites. Ce manque d’accès aux services de santé courants, comme la contraception, les antirétroviraux (ARV) et les médicaments contre l’hypertension, a accru la vulnérabilité des femmes aux infections, aux grossesses non désirées et à l’aggravation de leur état de santé.
Cependant, la pandémie a vu de nombreuses femmes des milieux ruraux du Cap-Oriental trouver des moyens de s’adapter à leurs réalités actuelles et d’améliorer leur bien-être et leurs moyens de subsistance. Dans de nombreux cas, les femmes se sont lancées dans l’agriculture de subsistance pour la consommation familiale et pour faire face à l’insécurité alimentaire croissante dans leurs collectivités.
« J’ai commencé l’élevage. J’ai des porcs et des poulets, mais il est risqué d’avoir des poulets dans cette communauté parce que les gens les volent. La criminalité dans cette communauté est décourageante, car vous n’élevez votre bétail que pour d’autres personnes, les porcs ne risquent pas vraiment d’être volés puisqu’ils font beaucoup de bruit. De plus, il est facile d’identifier un porc, pas un poulet. Je prévois également créer un jardin afin de pouvoir récolter des légumes et économiser de l’argent au lieu d’en acheter autant chaque mois », a déclaré Vuyiswa, une femme de 71 ans du village de Tuba, du Cap-Oriental.
En plus des effets directs sur les moyens de subsistance et l’accès aux services de santé, la pandémie a également eu des effets en cascade sur les femmes de milieux ruraux en raison de la migration inverse (zones urbaines vers les zones rurales), de la consommation de drogues, de l’augmentation de la criminalité rurale, de la violence fondée sur le genre et de la diminution des services offerts.
Ce projet vise à soutenir la définition et la génération de solutions et d’actions par les femmes locales et d’autres parties prenantes et partenaires afin de « reconstruire en mieux », en particulier dans le domaine de la santé publique et des moyens de subsistance.
Renforcer la résilience aux urgences sanitaires au Kenya en autonomisant les femmes
Au Kenya, le projet Chamas pour le changement (Chamas), dirigé par l’Université Moi et l’Université de la Colombie-Britannique, étudie l’impact de Chamas, un programme de santé communautaire dirigé par des bénévoles qui fait participer les femmes pendant la grossesse et les 1 000 premiers jours de la vie de leurs enfants, afin de déterminer si la participation à ses programmes atténue les effets de la pandémie de COVID-19 sur la santé et le bien-être économique des femmes et des enfants.
L’évolution des relations entre les genres commence au niveau individuel et communautaire. Dans le but d’institutionnaliser les approches inclusives dans les réponses à la COVID-19, la méthodologie de ce projet a été conçue avec le soutien d’un Conseil consultatif communautaire pour garantir l’inclusion des voix et des points de vue de la communauté tout au long de la durée de vie du projet.
Le Conseil comprend des personnes qui représentent les groupes communautaires pertinents, notamment des personnes qui font la promotion de la santé communautaire (bénévoles), des femmes adultes et adolescentes qui ont participé à Chamas, des groupes de pères, le ministère de l’Éducation, le ministère de la Santé et d’autres groupes communautaires pertinents. Il veille à l’inclusion de diverses perspectives dans la mise en œuvre du projet et fournit des renseignements sur les approches qui seront les plus efficaces pour s’engager avec la communauté à un niveau plus large. Le Conseil soutient l’élaboration d’outils, donne des conseils sur la meilleure approche pour diffuser l’information, sur les langues et les terminologies familières qui devraient être utilisées, et sur les moyens par lesquels la communauté devrait s’engager, en utilisant une approche centrée sur l’équité.
Cette approche responsabilise également les membres du Conseil qui ont fait preuve d’une confiance accrue dans leur rôle de responsables du changement dans leurs communautés et ont amélioré leur compréhension de la façon dont les dimensions centrées sur le genre sont essentielles à la conception de réponses efficaces et inclusives à la pandémie.
« En tant que président du Conseil consultatif communautaire, j’ai été témoin de sa croissance et de sa transformation depuis sa création en décembre 2022 afin d’être la voix de la communauté, de veiller à ce que l’étude réponde aux besoins des communautés, de formuler des recommandations sur la mise en œuvre de l’étude et la diffusion des résultats de l’étude », explique le Dr Mbithi du comté de Trans Nzoia. « Le Conseil a également permis aux principales parties prenantes du secteur de l’éducation et à la Chambre de commerce de mieux comprendre nos interventions en matière de santé et les rôles qu’elles peuvent jouer. Par exemple, nous collaborons avec le secteur de l’éducation pour réinscrire les mères adolescentes à l’école pour celles qui le souhaitent et dans les établissements d’enseignement technique et professionnel pour celles qui choisissent d’acquérir des compétences. »

Le projet Chamas cherche à remédier aux inégalités qui sont à l’origine de la mortalité maternelle et infantile au Kenya en étendant son programme à quatre comtés de l’ouest du Kenya. Cette solution combine les meilleures pratiques des programmes de santé des femmes et de microfinance pour créer une plateforme intégrée de prestation de services à faible coût, gérée par la communauté, durable de manière indépendante et acceptable sur le plan culturel. Cette intervention renforce l’autonomisation de la communauté et facilite les processus de responsabilisation à l’aide de Chamas, dirigés par des bénévoles en santé communautaire, pendant la grossesse et la petite enfance. Au cœur de cette approche se trouve l’intégration holistique de la littératie en matière de santé, sociale et financière afin d’améliorer les résultats en matière de santé dans le cadre d’un programme de mentorat de trois ans.
Le projet recueillera des descriptions quantitatives et qualitatives des effets de la pandémie sur l’équité sociale et entre les genres, ainsi que les principaux résultats en matière de santé, psychosociaux et financiers. Grâce à la méthodologie inclusive du projet et à son engagement précoce auprès des décisionnaires, ses conclusions guideront la mise à l’échelle du programme Chamas afin d’améliorer la santé et le bien-être des femmes et de renforcer le rétablissement équitable, les politiques transformatrices de genre et la préparation en vue de futures urgences sanitaires.
Regardez une vidéo [en anglais uniquement], préparée par Chamas, montrant comment le projet a aidé une adolescente enceinte.
Élaboration de politiques fondées sur des données probantes pour la santé et le bien-être des femmes et des personnes âgées au Kenya et en Ouganda
Au Kenya et en Ouganda, le projet FÉE-Vie, dirigé par le Community Health Support Program (COHESU) et l’Université de Waterloo, étudie les perceptions des femmes quant à leur autonomisation entre le travail (rémunéré et non rémunéré) et leur santé tout au long de la pandémie de COVID-19 et tout au long de leur vie.
Le projet détermine comment la pandémie a touché les femmes de différents groupes d’âge de différentes manières. Là où les jeunes femmes et les filles faisaient face à des problèmes, tels que la grossesse chez les adolescentes en raison de l’interruption de leurs études, les femmes plus âgées ont dû faire face au fardeau accru de la migration inverse, où les membres de la famille confrontés à la perte d’emploi sont retournés dans leurs foyers ruraux et sont devenus dépendants des soins de leurs matriarches.
« Nous avons constaté que l’impact de la COVID-19 en est un qui mettra des générations à se défaire. L’école est un refuge sûr pour les filles, et la pandémie a augmenté le nombre de filles non scolarisées en Ouganda, ce qui a entraîné une augmentation de l’incidence des grossesses chez les adolescentes. Ceci, associé au manque d’éducation de base gratuite en Ouganda, signifie un fardeau accru des soins pour les matriarches dans les régions rurales de l’Ouganda », explique Susan Elliot, professeure et cochercheuse principale. « Les interventions gouvernementales doivent aller au-delà de la réponse et se concentrer sur l’aide aux populations vulnérables à se remettre correctement des chocs de la COVID-19. Nous engagerons les décisionnaires politiques dans des dialogues délibératifs afin de coproduire des interventions adaptées au contexte local, culturel et géographique. »
Ces projets en Afrique du Sud, au Kenya et en Ouganda démontrent l’engagement découlant de l’initiative « Les femmes S’ÉLÈVENT » à soutenir des changements de politiques fondés sur des données probantes et des changements transformateurs de genre afin de garantir que les femmes peuvent s’adapter et prospérer après la COVID-19 et pendant les pandémies futures.
Les données probantes générées soutiendront l’élaboration d’un ensemble d’interventions pertinentes conçues conjointement à l’échelle locale qui englobe des solutions transformatrices de genre inclusives, durables et équitables pour la reprise à la suite de la COVID-19 et de futures urgences sanitaires.
En savoir plus sur l’initiative « Les femmes S’ÉLÈVENT » à la Conférence canadienne sur la santé mondiale de 2023
D’autres idées et leçons sur ces projets seront présentées lors de la Conférence canadienne sur la santé mondiale de 2023 qui se tiendra en personne et virtuellement du 16 au 18 octobre 2023 au Westin Ottawa, à Ottawa, au Canada.
Cette conférence annuelle rassemble des équipes de recherche, des spécialistes, des décisionnaires et des membres de la population étudiante de divers secteurs et disciplines pour discuter de problèmes urgents de santé mondiale. Elle offre une plateforme d’échange des connaissances, des pratiques exemplaires et des innovations en matière de recherche, de politiques et de pratiques en santé mondiale.
* Mandy n’est pas le vrai nom de la participante.