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Liens manqués : santé, genre et crise climatique

Sarah Czunyi

Administrateur(trice) de programme principal(e), CRDI

Toutes les deux minutes, une femme meurt des suites de complications liées à la grossesse ou à l’accouchement. Malgré des progrès antérieurs, les taux de mortalité maternelle ont maintenant stagné ou même inversé dans de nombreuses régions du monde, avec l’émergence de nouveaux risques, notamment les changements climatiques. 

Pendant la grossesse, une femme est trois fois plus susceptible de développer un paludisme grave, souvent mortel. À mesure que la température mondiale et les régimes de précipitations changent, les moustiques et autres vecteurs porteurs de maladies infectent de nouveaux hôtes dans de nouveaux endroits. Le paludisme n’est qu’un exemple de maladie qui n’est pas neutre en matière de genre et de risque sanitaire lié au climat. 

Inégalités entre les sexes en matière de santé dans un climat changeant 

L’année 2024 a été déclarée la plus chaude jamais enregistrée. À mesure que notre climat change, de nouvelles répercussions sur la santé se manifestent, à la fois directement en raison de la chaleur accablante, des incendies de forêt et des inondations, et indirectement en raison des changements écologiques et économiques qui ont une incidence sur la santé. Les données probantes montrent que les phénomènes climatiques extrêmes touchent les femmes, les filles et les personnes de divers genres de manière unique, ce qui les rend particulièrement vulnérables aux effets des changements climatiques sur la santé. Ces vulnérabilités ne sont pas dues uniquement à la biologie, car des facteurs tels que les normes culturelles, le statut socio-économique et l’emplacement agissent tous comme des multiplicateurs qui aggravent les effets sur la santé. 

Les données probantes sur les répercussions sexospécifiques sur la santé sont de plus en plus nombreuses, mais incomplètes 

Alors que les changements climatiques nous affectent tous, les femmes représentent 80 % des personnes déplacées par les changements climatiques et sont 14 fois plus susceptibles de mourir dans une catastrophe climatique. Parmi les autres répercussions sexospécifiques, mentionnons les suivantes : 

Malgré les nouvelles données probantes, beaucoup de choses restent inconnues. Il existe encore de grandes lacunes dans les données , aggravées par des données ventilées par sexe et par genre qui sont faibles ou incohérentes, en particulier dans les contextes à faible revenu et à revenu intermédiaire. Ce dont nous avons besoin, c’est d’un programme complet de recherche sur le climat et la santé qui englobe les données probantes sexospécifiques et intersectionnelles au premier plan, et non après coup. 

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Des femmes puisent de l’eau à Satkhira, au Bangladesh
GMB Akash/Panos Pictures
Des femmes puisent de l’eau à Satkhira, au Bangladesh, une région qui souffre de graves pénuries d’eau potable en raison de la pollution des eaux souterraines.

Soutenir la recherche à l’intersection de la santé, du genre et du climat dans les pays du Sud 

Bien que la sensibilisation et les investissements dans les avantages conjoints du climat et de la santé aient augmenté, aucun changement significatif ne sera réalisé sans une approche qui tient compte des inégalités entre les sexes, appuyée par des données spécifiques au contexte. Ces données probantes peuvent être utilisées pour permettre des changements dans les politiques et les pratiques par les moyens suivants : 

  • promouvoir l’équité entre les genres et le leadership 

  • tirer parti des connaissances traditionnelles et interdisciplinaires 

  • centrer le genre dans les politiques climatiques et de santé 

  • accéder au financement climatique pour les cobénéfices pour la santé 

  • investir dans des systèmes de santé résilients au climat 

Les bailleurs de fonds de la recherche ont un rôle à jouer pour soutenir des écosystèmes de recherche plus diversifiés et plus équitables, en veillant à ce que le programme de recherche soit guidé et ancré dans les réalités locales. Les programmes du CRDI appuient la recherche qui incarne ces valeurs. Les exemples incluent : 

  • Accroître les investissements dans des politiques climatiques et de santé sensibles au genre. Un projet du Fonds des Nations Unies pour la population financé par le CRDI vise à remédier au manque de compréhension et d’intégration de la santé sexuelle et reproductive dans les politiques climatiques nationales.  

  • Soutenir le renforcement des capacités des chercheuses ou chercheurs en début de carrière. Un projet financé par le CRDI renforce la capacité de recherche sur les changements climatiques et la santé grâce à des outils de formation sur le genre et l’intersectionnalité, dirigé par le Programme spécial de recherche et de formation concernant les maladies tropicales, coparrainé par l’OMS, l’UNICEF, le Programme des Nations Unies pour le développement et la Banque mondiale.  

  • Soutenir la recherche transformatrice de genre sur les maladies tropicales négligées. Le CRDI appuie la recherche menée dans le cadre de l’initiative Médicaments contre les maladies négligées afin d’élaborer des solutions de traitement plus inclusives pour les femmes touchées par des maladies à transmission vectorielle négligées.   

  • Améliorer la collaboration mondiale pour générer des données probantes et des pratiques exemplaires. Le CRDI et le Foreign, Commonwealth and Development Office du Royaume-Uni appuient cinq centres régionaux afin d’améliorer la recherche menée à l’échelle locale sur le climat et la santé. En mettant l’accent sur le genre et l’intersectionnalité, les carrefours contribueront à des soins de santé plus résilients aux changements climatiques. 

Vers des solutions à des problèmes complexes 

Les crises complexes et étroitement liées des changements climatiques et de la santé exigent des solutions inclusives et fondées. Aujourd’hui plus que jamais, le soutien aux chercheurs des pays du Sud est crucial pour générer des données probantes nuancées et opportunes sur les risques et les réponses pour les populations qui ont traditionnellement été sans voix. Pourtant, avec la chaleur, les inondations et les incendies qui frappent déjà nos portes, le temps n’est pas de notre côté. Chaque minute compte. 

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