L’adaptation aux changements climatiques doit être inclusive, équitable et représentative
Le rapport spécial du Groupe d’experts intergouvernemental OMM/PNUE sur l’évolution du climat (GIEC) intitulé Global Warming of 1.5oC (Réchauffement planétaire de 1,5 oC) est sans équivoque : le réchauffement climatique causé par les activités humaines persistera pendant des siècles (et même des millénaires) et continuera de provoquer des changements à long terme du système climatique.
Le rapport indique clairement que les populations défavorisées et vulnérables sont exposées au risque de façon disproportionnée et qu’une adaptation progressive et transformationnelle est nécessaire pour faire face à des risques tels que l’élévation du niveau de la mer, la sécheresse et les inondations. L’une des raisons pour lesquelles le CRDI collaborera avec la Commission mondiale sur l’adaptation au cours des deux prochaines années consistera à éviter la tentation d’adopter des solutions rapides à ces problèmes. Accroître la visibilité et l’importance politique de l’adaptation aux changements climatiques et préconiser des solutions audacieuses telles que des investissements plus intelligents, de nouvelles technologies et une meilleure planification pour devenir plus résistant aux menaces liées au climat seront au coeur du travail de la Commission mondiale.
Convoquée par les Pays-Bas et le Canada, ainsi que 15 autres pays, la Commission a été officiellement lancée en octobre pour apporter une contribution essentielle aux sommets climatiques des Nations Unies prévus pour 2019 et 2020. L’un des principaux défis que la Commission devra relever sera de trouver un équilibre entre l’attrait des solutions à court terme et la nécessité de faire comprendre ce qu’il faut pour poursuivre l’adaptation à long terme d’une manière qui favorise l’équité sociale.
Les effets des changements climatiques peuvent avoir un effet boule de neige : une sécheresse prolongée provoquera de mauvaises récoltes, ce qui entraînera la faim et une baisse des revenus. Par la suite, ces faibles revenus rendent les frais de scolarité inabordables, ce qui empêche les enfants d’obtenir une formation scolaire. Pour trouver des solutions efficaces aux difficultés liées au climat, il est crucial de comprendre l’expérience vécue par les communautés réelles – tout en restant prudent avec les solutions « rapides » qui vantent les avantages fiscaux fondés sur l’intérêt personnel. Dans ces contextes, il peut être plus pertinent de développer la capacité de collaborer et de s’appuyer sur les pratiques existantes, plutôt que d’adopter des solutions parachutées de l’extérieur.
Démystifier l’adaptation et l’équité
Le besoin de solutions et d’initiatives locales en matière d’adaptation n’est que l’un des points soulevés au cours du dialogue de la Commission à Ottawa. Le dialogue a également souligné la nécessité urgente de démystifier la poursuite simultanée de l’adaptation climatique et d’un monde plus équitable. Le projet ASSAR (Adaptation à différentes échelles dans les régions semi-arides) est un exemple de la façon dont cet objectif est atteint à grande échelle.
Les recherches ont montré que le Botswana est un point névralgique des changements climatiques : une augmentation de 1,5 oC à 2 oC mondialement se traduira par une augmentation de 2,2 oC à 2,8 oC localement. Le Botswana et d’autres pays semi-arides d’Afrique australe sont confrontés à un avenir de sécheresses intensifiées et plus longues. Et lorsque les pluies tombent, on s’attend à ce qu’elles soient intenses et provoquent des crues soudaines. Dans ces contextes, il est essentiel de se demander quels sont les points d’entrée les plus efficaces pour soutenir les réponses systémiques au risque climatique qui donnent la priorité aux voix des plus vulnérables. Cette question est importante pour prévoir les adaptations en vue d’un changement à long terme, dans 10 et 20 ans.
Au Botswana, une solution consiste à renforcer la planification à l’échelle des districts. À cette échelle, les collectivités peuvent directement faire valoir leurs intérêts et leurs aspirations dans des actions et des investissements pratiques. Après avoir intégré l’évaluation participative de la vulnérabilité et des risques dans l’un de ces plans de développement, le consortium ASSAR a été invité par le Bureau du président à déployer cette stratégie à l’échelle nationale. Aujourd’hui, les 16 districts du pays ont tous formé des agents de développement de district et des planificateurs économiques capables de travailler avec leurs collectivités pour gérer les risques climatiques et atteindre les plus vulnérables, notamment les femmes et les filles. Ce succès a été souligné par les Nations Unies comme une pratique exemplaire en matière d’adaptation inclusive, un exemple pour les négociations climatiques à venir et les plans nationaux d’adaptation dans d’autres pays.
Stratégies systémiques et axées sur l’avenir
Il est essentiel d’adopter des approches systémiques et tournées vers l’avenir qui visent à obtenir des résultats à plus long terme. Au Botswana, le point d’entrée de la planification de district offrait un moyen d’accélérer l’adaptation à l’échelle d’un pays. Elle est également enracinée là où les gens vivent, s’engageant dans un travail plus profond de mise en oeuvre de valeurs telles que l’égalité des sexes au fur et à mesure que la politique climatique et de développement est formulée. Voilà à quoi peut ressembler l’adaptation à différentes échelles.
Le CRDI et ses programmes sur les changements climatiques, comme le Réseau de connaissances sur le climat et le développement (CDKN), travailleront de concert avec la Commission au cours des deux prochaines années pour appuyer les efforts visant à opposer ce genre de solutions plus « douces » à une infrastructure et à des solutions financières plus rigoureuses et les considérer comme essentielles et dignes de reconnaissance. Si la communauté mondiale n’y parvient pas, l’expérience nous dit que les mesures d’adaptation, les investissements et les infrastructures sont moins susceptibles d’atteindre les personnes les plus vulnérables aux changements climatiques.
Georgina Kemp est administratrice de programme principale pour le projet Accélérateur des connaissances du Climate & Development Knowledge Network (CDKN), et de l’Initiative de recherche concertée sur l’adaptation en Afrique et en Asie (IRCAAA). Bruce Currie-Alder est chef de programme de l’IRCAAA et CDKN.